5 anecdotes sur mon parcours professionnel
Lors de ma dernière participation à un mini-challenge sur Instagram où il était question de raconter plusieurs anecdotes étonnantes sur soi, j’ai évoqué mon parcours professionnel en story. Par la suite j’ai reçu de nombreuses questions par messages… et je me suis rendue compte que mon parcours intéressait les gens.
Forcément, si je dis que j’ai été fonctionnaire, ça ne fascine personne. Mais quand je rentre dans les détails… là je vois des yeux qui brillent!
Alors je me suis dit que j’allais vous raconter tout ça dans un article, avec moults détails, anecdotes et réflexions sur les leçons tirées de ce parcours.
1. J'ai été restauratrice de livres anciens à la Bibliothèque nationale de France (BnF)
De la Nièvre à Paris, de l'école à la BnF
Comment j’en suis arrivée à restaurer des livres? Bonne question!
Il était une fois… Nan je déconne!
Après un Bac Lettres-Arts, j’ai négocié un virage à 360 degrés: j’ai fait un CAP. Carrément. La petite nivernaise que j’étais (et que je suis toujours, dans le cœur et sur la plaque d’immatriculation de ma voiture) n’avait qu’une obsession: monter à Paris. Moi qui adorais les livres, voilà que je trouve un obscur CAP de reliure-dorure spécial post-Bac, à Paris justement. Alors j’ai pris mes petites affaires et je suis « montée à la capitale ».
Pour faire court, après ce CAP j’ai enchaîné sur un diplôme des métiers d’art, toujours en reliure, puis j’ai cherché du boulot. Les débouchés étant maigres dans le domaine, j’ai rapidement passé un concours de la fonction publique. Je l’ai obtenu et je me suis retrouvée fonctionnaire au Ministère de la Culture, catapultée restauratrice de livres au Centre technique de la Bibliothèque nationale de France.
Les trésors de la Bibliothèque nationale de France
Autant vous le dire tout de suite, relier des livres et les restaurer, ce n’est pas la même chose. Je me suis donc formée sur le tas. J’ai restauré des ouvrages datant du XVe au XIXe siècle. Le livre le plus ancien sur lequel j’ai travaillé était un incunable (un livre imprimé avant 1500).
Mais il n’y a pas que des livres à la BnF. Il y a aussi des archives.
Pas beaucoup, certes, car c’est le domaine des Archives nationales.
Mais j’ai eu la chance de travailler sur les archives de la Bastille, celles-là même qui ont été jetées dans les fossés la prison lors de la Révolution française puis éparpillées. Elles ont ensuite été en grande partie récupérées… mais pas toujours en bon état!
Pendant plusieurs mois, j’ai donc nettoyé et restauré ces archives pleines de terre (avec parfois des plumes et des restes de cartes à jouer agglomérées).
De la terre des fossés de la Bastille de 1789…
Vous imaginez!!!
J’ai aussi eu la chance de travailler sur des affiches, des plans et des pochettes de disques (oui, oui!). Sans compter les journaux.
Aaaah les journaux… Je me souviens que les premiers « documents à plat » sur lesquels j’ai travaillé à mon arrivée à la BnF étaient des piles de numéros du journal colonial « Le réveil saïgonnais ».
Interminable!
Vous vous dites que travailler sur un journal colonial, ça ne devait pas être très amusant vu les articles qu’on pouvait y trouver?
Eh bien attendez un peu de lire la suite…
Les journaux racistes et la notion de service public
A mon arrivée à la BnF, on m’a demandé: « pensez-vous avoir le sens du service public? ». Comme je venais seulement d’intégrer la fonction publique, on m’a cordialement invitée à réfléchir à cette notion.
C’est quoi le service public?
J’avoue, je ne m’étais jamais posée la question. En y réfléchissant, je me suis dit que c’était avoir conscience qu’on ne travaillait pas pour soi, pour s’enrichir, mais pour les autres. Définition quelque peu limitée qu’un évènement m’a vite amenée à revoir.
Car un jour, mon atelier a reçu un nouveau lot de journaux à restaurer.
Des journaux racistes.
Anti-arabes et anti-juifs, ils dataient, si ma mémoire ne me trompe pas, du début du XXe siècle. Certains étaient illustrés de dessins particulièrement violents ou dégradants.
Consternation dans l’équipe de restaurateur.ices.
Personne n’avait envie de toucher à ça.
Sauf que… il y a le service public. Et faire du service public, pour un restaurateur, c’est rendre tous les documents publics consultables par tout un chacun, ce qui veut dire conserver l’Histoire sous toutes ses formes… même les plus discutables. Ces journaux, aussi abominables soient-ils, sont la mémoire de l’Histoire et en tant que tels, l’Etat se doit de les préserver.
Une belle leçon.
2. J'ai eu des documents historiques entre les mains aux Archives nationales
Après avoir passé 6 ans à la BnF, un second concours m’a amenée à travailler aux Archives nationales.
Je ne connaissais rien aux archives. Je me suis donc renseignée et j’ai découvert, à mon grand désarroi, un milieu très codifié.
Les archives nationales conservent des dizaines de séries, des centaines de sous-séries et des millions de documents (oui, oui, des millions). Donc forcément, il faut un système bien cadré pour gérer tout ça.
Mais, pour être franche je crois que ce qui m’a achevée, c’est la définition-même d’une archive publique, puisque, finalement, c’était ça que j’allais restaurer! Et la loi dit ceci: « Les archives publiques sont l’ensemble des archives produites, reçues ou traitées par toute personne, physique ou morale, exerçant une mission de service public ou tout service ou organisme public français ».
Des documents administratifs?? Autant vous dire, que je n’étais pas très motivée: j’étais persuadée que j’allais m’ennuyer…
J’étais bien naïve!
Des documents administratifs... émouvants
A mon arrivée aux Archives nationales, mes nouvelles collègues et moi avons eu droit à une semaine de dépoussiérage intensif d’archives… histoire de se familiariser avec les documents et les dépôts dans lesquels on devait aller les chercher (un labyrinthe avec des milliers de boîtes d’archives réparties dans les sous-sols de plusieurs hôtels particuliers!).
Je me souviens que je nettoyais un registre dont je n’avais même pas regardé la date quand j’ai remarqué que les pages de ce registre n’étaient pas, comment dire… très variées.
C’était une liste quasi ininterrompue de noms.
Je me suis penchée et j’ai constaté que c’était la liste de personnes arrêtées par la police. Et dans la colonne « motif d’arrestation », on lisait invariablement le même mot: « juif ».
Stupeur.
J’ai lâché ma gomme et j’ai commencé à compulser fébrilement les pages de cette longue liste. Vous l’avez compris, j’avais entre les mains l’un des registres de la police sous le régime de Vichy.
Avouez que le terme « document administratif » prend un tout autre sens, non?
La charge émotionnelle des archives
Pas la peine de vous faire un dessin (blague d’illustratrice), vous avez bien compris toute la charge émotionnelle que peuvent porter ces petits bouts de papiers. Bien évidemment, toutes les archives ne sont pas aussi fortes émotionnellement.
Aux archives nationales, les restaurateur.ices travaillaient sur des documents très différents: des liasses de papiers plus ou moins intéressants, des plans (parfois tellement grands qu’on ne pouvait même pas les dérouler entièrement), des parchemins scellés (avec des sceaux en cire ou en métal), des terriers médiévaux etc.
Mais il faut bien l’avouer, beaucoup d’archives anciennes, malgré leur caractère sec de documents administratifs, ont une charge émotionnelle importante.
Laissez-moi vous raconter une autre anecdote.
L’atelier de restauration des Archives nationales recevait très souvent la visite de délégations, françaises ou étrangères, de groupes de collègues des Archives départementales en formation, etc.
Lors de l’une de ces visites, mes collègues et moi travaillions sur des documents très importants historiquement en vue de leur numérisation: les journaux de bord des bateaux négriers qui ont, au XVIIIe siècle, participé à la traite des esclaves au bénéfice de la France.
L’un des visiteurs est venu me voir et, après m’avoir demandé sur quoi je travaillais, m’a interrogé sur le pays d’où venait le bateau négrier dont j’avais le journal de bord.
C’était le Sénégal.
Gros silence.
Il m’a alors dit, des larmes dans les yeux: « Alors ça parle peut-être de ma famille ».
En tant que restauratrice, mon travail était de prendre soin des documents dont j’avais la charge. Mais autant vous dire que, ce jour-là, j’ai mis un soin tout particulier dans mes restaurations…
Des archives prestigieuses qui ont fait l'Histoire
Aux Archives nationales, il y a des documents tellement précieux, que certains sont gardés dans une armoire qui date de 1790: l’armoire de fer (si vous voulez la voir, elle est ouverte en de rares occasions devant le public, notamment lors des Journées du patrimoine).
J’ai eu la chance d’avoir entre mes mains certains des documents qui y sont conservés!
En effet, les Archives nationales ont décidé de permettre au public de découvrir ses documents les plus précieux sans pour autant sortir les originaux. L’institution a donc commandé des fac-similés.
Qu’est-ce que les restaurateurs viennent faire dans cette histoire me direz-vous? Eh bien le but était de faire en sorte que les fac-similés ressemblent aux originaux. Et, pour la première et dernière fois de ma carrière de restauratrice, j’ai dû faire l’inverse de mon travail habituel: j’ai dû abîmer des documents!
Mais pour pouvoir le faire correctement, encore fallait-il savoir quel était l’état des archives originales. Et c’est ainsi que j’ai eu entre les mains, tout juste sortie de l’armoire de fer, la dernière lettre de Marie-Antoinette!
Le second original qui m’a été confié était l’un des premiers parchemins mérovingiens (VIIIe siècle!).
Mes collègues travaillaient eux-mêmes sur d’autres fac-similés. Nous avons ainsi pu avoir sous nos yeux des archives (originales!) aussi incroyables que l’édit de Nantes, le diplôme de Charlemagne, la constitution de la Ve république etc.
La classe, non?
3. Je suis médiéviste
Toutes ces histoires peuvent paraître idylliques mais la réalité est souvent beaucoup plus terre à terre.
La vérité? J’ai vite su que je n’étais pas faite pour le métier de restauratrice. J’ai fait ce travail pendant 10 ans et pourtant j’ai commencé à me poser des questions 2 ans seulement après mon entrée dans la fonction publique.
Que faire alors?
La découverte de l'histoire de l'art médiéval
Eh bien j’ai repris mes études! Je suis retournée à mes premières amours: l’histoire de l’art.
Me voilà donc partie pour faire une licence par correspondance à l’université de Lille 3. Je l’ignorais alors mais cette fac était réputée pour son enseignement en art médiéval. J’ai donc découvert l’art du Moyen Âge avec émerveillement… passé les premiers moments de perplexité.
Imaginez un peu: le tout premier cours que j’ai ouvert traitait les grands portails sculptés romans. Intriguée, j’ai feuilleté le document… et je suis tombée sur des mots comme « grande eschatologie » ou « seconde parousie christique ».
J’ai refermé le cours en me disant « Ok. C’est pas pour moi. »
Et pourtant… tous ces cours se sont finalement révélés passionnants. A tel point que j’ai décidé de poursuivre en master d’histoire de l’art médiéval à l’université de Nanterre. Mais sur quel sujet allais-je bien pouvoir travailler pour mon mémoire?
Moyen Âge et torture
Si vous êtes arrivés jusqu’ici dans l’article, je suis sûre vous avez deviné sur quoi je voulais travailler. Un livre bien sûr!
Plus précisément, c’était l’enluminure qui m’intéressait.
Comme je travaillais alors encore à la BnF, j’ai proposé d’étudier un manuscrit de l’institution.
La conservatrice que j’ai rencontrée à ce sujet m’a alors suggéré un énormissime manuscrit du XVe siècle, le Miroir historial de Vincent de Beauvais, dont l’une des spécificités étaient la grande place attribuée aux vies de saint.es (vous savez, ces gens qui ont été torturés, éviscérés, grillés, pendus, écartelés, décapités et autres réjouissances).
« Et d’ailleurs », m’a t-elle précisé, « ce serait sans doute très intéressant d’en profiter pour travailler sur la représentation des outils de torture! »
Ah ah ah! Ah… Non, merci mais sans moi!
Finalement, j’ai fait un mémoire tout ce qu’il y a de plus classique, sans pince, grill ou autre outil de torture (n’insistez pas, c’est pas mon truc!).
Si le cœur vous en dit, l’article que j’ai écrit à la suite de mon mémoire est maintenant en ligne. Accrochez-vous, parce que c’est quand même moins marrant qu’un article de blog!
On dit "médiéval" et pas "moyenâgeux"!
D’ailleurs, puisqu’on en est à parler du Moyen Âge, profitons-en pour évoquer LE truc qui rend dingues les médiévistes: l’utilisation du mot « moyenâgeux ».
Pour qualifier quelque chose qui date du Moyen Âge on dit « médiéval.e ».
ME-DIE-VA-L.E
Le mot « moyenâgeux » a une connotation extrêmement péjorative, un peu comme si tout ce qui datait du Moyen Âge était arriéré et barbare. Pour la petite histoire, sachez que la Renaissance, période encensée en histoire de l’art, est bien plus moyenâgeuse que le Moyen Âge lui-même, que ce soit politiquement, socialement ou humainement.
Alors ne vous trompez plus de mot en présence d’un.e médiéviste, vous risqueriez une mort terrible dans d’atroces souffrances.
Vous voilà prévenu.es!
4. J'ai été chargée de la bibliothèque du Musée de Cluny (Musée national du Moyen Âge)
Changement de décor
Mon master en poche, je n’avais qu’une idée en tête: trouver du travail en lien avec ce nouveau diplôme. Mais autant vous dire que les jobs dans le domaine de l’histoire de l’art médiéval ne courent pas les rues, même dans la fonction publique.
Heureusement, les planètes ont fini par s’aligner. J’ai postulé au Musée de Cluny (le musée national du Moyen Âge à Paris) et je me suis retrouvée en charge des presque 20 000 livres de sa bibliothèque.
Petite précision quand même, car je ne voudrais pas vous vendre du rêve pour rien: je n’étais pas chargée des manuscrits médiévaux du musée!
Chaque musée national possède un centre de documentation dédié à ses oeuvres, une photothèque et une bibliothèque en lien avec ses collections. Dans le cas du musée de Cluny, 20 000 livres sur l’art médiéval, mis à la disposition du public…
Autant vous dire que j’ai eu du boulot pendant les 8 ans où j’y suis restée, puisque j’étais seule pour m’occuper de tout ce petit monde!
De la Dame à la licorne à Dagobert
Je vous vois venir.
Vous allez me demander si j’ai des anecdotes croustillantes à vous raconter, comme pour la BnF et les AN.
A vrai dire, les problématiques étaient très différentes. En tant que restauratrice, c’était moi et mon livre/archive à restaurer. Personne d’autre. Tandis qu’au musée de Cluny, je n’étais plus restauratrice et je recevais du public. Toute sorte de public: des professionnel.les des musées, des artistes, des chercheur.euses, des particuliers .
Et c’était souvent les particuliers qui faisaient les recherches et plus improbables et intéressantes.
Comme cette fleuriste qui cherchait des représentations médiévales (ME-DIE-VA-LES!) de fleurs coupées ou encore cet homme qui fabriquait des maquettes de boutiques et qui cherchait à quoi pouvaient ressembler les enseignes médiévales.
Mais si vous voulez du croustillant, il faut se tourner vers LE chef-d’oeuvre du musée de Cluny, qui cristallise toutes les passions: la tapisserie de la Dame à la licorne (XVe siècle).
Vous la connaissez forcément, même si vous n’avez jamais mis les pieds au Musée de Cluny.
Mais si! C’est elle qui tapisse les murs de la salle commune des Gryffondors dans les films « Harry Potter »!
Bref… cette tapisserie rend les gens fous.
Je me souviens d’un chercheur qui m’a parlé pendant presque 1h des connotations sexuelles qu’il voyait dans la tapisserie.
Ou encore de ce particulier qui, lorsque la salle de la Dame a été réouverte après travaux, a réussi à trouver mon numéro de téléphone et m’a littéralement engueulée pendant 20 minutes parce que la nouvelle salle n’était pas à son goût.
Mais travailler sur le Moyen Âge pouvait parfois se révéler très amusant, surtout quand il s’agissait de lutter contre toutes les idées reçues sur cette période (et il y en a beaucoup!).
Ce fut le cas pour les Mérovingiens, sur lesquels mes collègues et moi avons été amenés à enquêter dans le cadre d’une exposition, afin de remettre un peu d’historicité dans toutes les vieilles croyances: les « rois fainéants » étaient-ils vraiment des flemmards? Qui a cassé le vase de Soissons? Le roi dagobert mettait-il vraiment sa culotte à l’envers?
Avouez que ça fait envie!
Moyen Âge et politique
Le revers de la médaille quand on travaille sur le Moyen Âge, c’est principalement la réutilisation politique de la période. C’est comme ça, on y est forcément confronté.es quand on travaille dans une institution de cet ordre.
Si vous ne voyez pas de quoi je parle, il suffit d’évoquer Jeanne d’Arc et sa récupération par l’extrême-droite. Je suis sûre que vous en avez déjà entendu parler.
Cela rend parfois le travail compliqué.
Par exemple, pour réaliser une bibliographie scientifique (donc sérieuse) sur les Mérovingiens (encore eux), j’ai dû faire des recherches sur une liste de 600 livres pour dénicher les auteurs qui profitaient du sujet pour faire de la politique (extrême la plupart du temps) ou du prosélytisme religieux (les racines chrétiennes de la France, tout ça, tout ça). Et croyez-moi, il y en avait beaucoup.
J’imagine que vous auriez préféré que je vous raconte des histoires de fantômes qui peupleraient les couloirs de cet hôtel particulier du XVe siècle. Désolée, mais à part un livre qui est tombé un jour tout seul d’une étagère, je n’ai rien de croustillant à vous proposer!
5. Tout lâcher pour devenir illustratrice
Bien évidemment je ne pouvais pas terminé cet article sans parler de dessin! A ce stade de la lecture, vous vous demandez peut-être à quel moment le dessin est entré dans ma vie.
Les illustrateur.ices ou le syndrôme de Peter Pan
La question se pose en réalité dans l’autre sens. Si vous en parlez à mes collègues illustrateur.ices, ils.elles vous diront probablement la même chose que moi: nous sommes des enfants qui ne se sont jamais arrêtés de dessiner.
A l’âge où les enfants commencent à délaisser le papier et les crayons de couleur, nous, on n’a pas pas voulu lâcher l’affaire!
Enfant, j’avais décidé que je ferai du dessin plus tard (j’avais de grands projets d’avenir, comme le montre cette petite bd sur le sujet que vous avez peut-être vue passer sur Instagram).
Au lycée je me suis donc inscrite dans une section littéraire/arts plastiques, pour pouvoir enfin dessiner tout mon soûl.
Et là, ce fût le drame.
Mon professeur d’arts plastiques ne jurait QUE par l’art contemporain, avec un mépris à peine déguisé pour le reste de l’histoire de l’art (ça fait beaucoup de mépris quand même). En terme de pratique, on a fait du dripping sur des toiles de 5 mètres de long, des sculptures abstraites dans du béton cellulaire, mais point de dessin.
Déçue, j’ai fini par prendre des cours en dehors du lycée. Autant vous dire que je m’en suis donnée à cœur joie: j’ai appris le dessin d’objet, le portrait, le corps humain, les bases de la perspective. J’ai essayé plein de techniques: le crayon de papier, de couleur, le fusain, le pastel, la sanguine, l’acrylique… bref, je me suis éclatée.
Apprendre par soi-même
Si vous me connaissez un peu, vous vous dites sans doute: « Tiens c’est drôle, elle ne parle ni d’aquarelle, ni d’encre ». Bien vu!
Les media que j’utilise aujourd’hui, principalement le numérique, l’encre et l’aquarelle, sont des techniques que j’ai apprises en autodidacte, par l’expérimentation en général mais aussi à grands coups de tutos internet pour le numérique.
C’est justement pour le dessin numérique que le chemin a été le plus long, car je partais de zéro. Avant même d’acheter ma première tablette graphique, je cherchais le moyen d’inventer des personnages, sans avoir besoin de copier littéralement des photos, comme je le faisais quand je prenais des cours de dessin.
Mais pas facile de faire du character design toute seule et sans méthode.
La réponse à mon problème est venue d’elle-même, du fond de mon enfance passée dans les années 80, cette décennie qui a vu déferler sur la France le pire et le meilleur du dessin animé japonais.
C’est donc en m’appuyant sur le dessin de manga que j’ai commencé à apprendre la stylisation des corps et des visages, le placement des lumières, tout ça sur papier, en colorisant mes petits personnages aux feutres promarker.
Je garde encore ces reliques bien précieusement!
Différents essais de character design inventés en style « manga japonais »
Je suis passée des feutres à la tablette numérique quelques temps après, et je ne vous cache pas que ça a été laborieux.
Mais tout s’apprend!
Encore aujourd’hui, et je pense que vous vous en êtes rendus compte, on sent clairement l’influence du manga japonais dans mes dessins.
Passer au numérique a rapidement créé un manque de dessin traditionnel. C’est comme ça que j’ai commencé à pratiquer l’encre et l’aquarelle. Depuis j’oscille entre les deux, telle une balance qui refuse de poser l’un de ses plateaux: faire du dessin numérique me donne envie de reprendre mes crayons et mes pinceaux tandis que dessiner à l’encre et à l’aquarelle me donne envie de reprendre mon stylet.
Bye bye la fonction publique?
A force de travail j’ai commencé à m’améliorer, et en 2019, j’ai finalement pris un statut d’artiste-auteur en plus de mon travail au musée de Cluny.
Sauf que… entre ce travail et mes 10h minimum de transport hebdomadaire, je n’avais pas assez de temps pour le dessin. Alors j’ai fini par poser une disponibilité en octobre 2021.
Bref, un gros challenge.
Alors, adieu la Culture? L’avenir le dira. En tous cas, une chose est sûre, la volonté de transmettre est très forte et j’essaie de le faire maintenant par le dessin. Le meilleur exemple en est sans doute les dessins et les articles sur le paganisme. La culture par le dessin, ça sonne bien non? C’est aussi dans cette optique que j’ai commencé à me former à la facilitation graphique, le meilleur moyen pour faire passer des idées par le croquis.
Voilà, vous savez (presque) tout sur moi maintenant!
En conclusion, je souhaiterais souligner que cet article n’existe pas tant pour parler de mon parcours que pour parler des choses qui, finalement, m’ont faite vibrer et réfléchir tout au long de ma vie professionnelle.
Si ces mots peuvent convaincre certain.es qu’on peut changer de carrière, reprendre des études n’importe quand, à n’importe quel âge, alors je considèrerai mon but atteint.
Et si en plus je peux convaincre certaines personnes réticentes que les fonctionnaires ne sont pas de petits gnomes malingres et maussades cachés derrière leur écran d’ordinateur mais pour la plupart des personnes investies et passionnées par leur travail, avec une vraie volonté de transmettre au plus grand nombre, alors j’aurai tout gagné!
En attendant, je continue mon petit bonhomme de chemin dans l’illustration en travaillant d’arrache-pied pour m’améliorer encore et toujours afin de vous proposer des dessins de qualité. N’hésitez pas à aller voir ce que je vous propose dans la boutique!
A bientôt!
Hisae
Pour ne rien rater des prochains articles de blog, des nouveautés de la boutique et pour gagner des petits cadeaux, n’hésitez pas à vous inscrire à la Newsletter!